7H45, ce matin, les CRS sont arrivés à l'église Saint-Bernard. En quelques minutes, ils ont investi l'édifice et emmenés les sans-papier. Les sympathisants massés devant le parvis ont été dispersés avec de gaz lacrymogènes et des matraques. Dans une grande confusion, étrangers, anonymes, célébrités ont tenté de s'opposer aux forces de l'ordre. Certains ont réagi violemment, d'autres sont sortis de l'église sans histoire. Les dix grévistes de la faim ont été emmenés sur des brancards et dirigés vers les hôpitaux militaires de Saint-Mandé et de Clamart.
Saisi lundi, le Conseil d'Etat a répondu hier soir aux questions posées par le gouvernement sur les conditions d'application des lois Pasqua, relatives à l'immigration. Fort de son rôle de conseil juridique du gouvernement, le conseil d'Etat a réaffirmé l'évidence : nécessité d'appliquer la loi, de façon rigoureuse et identique pour tous. Alain Juppé a donc expliqué que le cas de chacun de ces étrangers serait examiné individuellement. Puis, en fonction des dossiers, régularisations ou reconduites à la frontière seraient ensuite appliquées.
Une partie de la classe politique a déjà réagi à cette opération matinale. Philippe de Villiers a salué l'attitude du gouvernement, Lionel Jospin a parlé "une intervention absurde et dommageable". "Le recours à la force est un aveu d'échec", a estimé François Hollande, le porte-parole du PS. Eric Raoult, ministre de l'Intégration et de la lutte contre l'exclusion, a pour sa part, souligné le caractère inéluctable de cette décision, expliquant qu'on ne pouvait pas "régler des situations administratives dans les bénitiers ou sous les sunlight des caméras". "On ne négocie pas avec la loi", a déclaré Michel Péricard, président du groupe RPR à l'assemblée. Jean-Louis Debré, lors d'une conférence de presse à midi, a tenu à expliquer la ligne d'action que s'était fixée le gouvernement. Il a détaillé, catégorie par catégorie, les perspectives réservées aux étrangers de l'église Saint-Bernard.
Les 300 sans-papier ont été conduits dans les commissariats et les centres de rétention. Une manifestation de soutien doit avoir lieu aujourd'hui en fin d'après-midi.